Les inégalités femmes-hommes parmi les cadres : des mesures saluées mais un sentiment d’inertie

Publié le Mercredi 22 septembre 2021

Comment les cadres perçoivent-ils les inégalités femmes-hommes dans le monde du travail et les actions mises en œuvre pour y remédier ? Cette étude de l’APEC apporte des pistes de réflexion.

En mars 2021, l’APEC a publié une étude reposant sur deux enquêtes réalisées auprès de 16 000 salarié·e·s cadres en poste du secteur privé pour l’une et 1 000 salarié·e·s cadres en poste du secteur privé, pour l’autre. Les résultats montrent que les cadres saluent les mesures étatiques mises en place ces dernières années. L’arrivée de l’index et l’allongement du congés paternité sont des actions perçues favorablement. Ce dernier est plébiscité par 79% d’hommes et 75% de femmes, surtout par les jeunes cadres.

Pour autant, les cadres ont le sentiment que la situation stagne. Seuls 31% considèrent que les inégalités femmes-hommes se sont réduites au cours des cinq dernières années. Les femmes sont les plus critiques – seules 14% estiment qu’il y a eu des avancées.

Deux points critiques: les rémunérations et l’accès aux responsabilités stratégiques

Les inégalités salariales entre cadres sont toujours bien présentes : en 2019 le différentiel est de 13% en faveur des hommes sur le salaire médian et cet écart n’a pas tendance à se réduire. L’écart s’explique en partie par des différences de profils : les femmes cadres sont en moyenne plus jeunes et donc moins expérimentées – or c’est un facteur déterminant de la rémunération. Des effets structurels (différences de métiers ou de secteurs) peuvent en partie expliquer cet écart. Pour autant, une part importante de cette variation demeure inexpliquée. A profil et poste équivalent les hommes cadres gagnent toujours 7% de plus que leurs homologues femmes. Malgré une lueur d’espoir - les écarts se sont légèrement résorbés pour les catégories les plus jeunes – le ressenti de cette inégalité est fort : 1 cadre sur deux considère qu’il existe, à compétences égales, des inégalités salariales.


Concernant l’accès des femmes aux responsabilités stratégiques, si 78% des cadres considèrent que femmes et hommes ont les mêmes chances d’évolution de carrière, les hommes sont 87% à le penser contre 63% de femmes. Cette différence de perception s’accentue entre 35 et 54 ans. Dans les faits, les femmes sont moins souvent managers, quel que soit leur âge (35% contre 43% pour les hommes). En conséquence, seules 29 % des femmes cadres sont aujourd’hui managées par une femme, contre 79 % des hommes cadres managés par un homme. Les modèles pour les femmes sont donc moindres. Lorsqu’elles sont managers, les femmes le sont plus souvent sur des postes de management de proximité, leurs équipes sont plus petites et moins souvent composées de cadres. Elles gèrent moins souvent un budget.

Les inégalités de parcours résultent de facteurs multiples.

Les contraintes familiales, d’abord, pèsent toujours plus sur les femmes. À l’arrivée des enfants, les femmes cadres réduisent plus souvent leur temps de travail. 14 % des femmes cadres de 35 à 54 ans sont à temps partiel, soit nettement plus que les hommes cadres de la même catégorie d’âge (3 %). Le confinement en a été une illustration : les femmes cadres ont plus souvent assumé la prise en charge de leurs enfants quitte à devoir décaler leurs horaires de travail. Or, 50 % des managers estiment qu’un·e salarié·e qui reste tard est plus engagé·e dans son travail et 45 % pensent qu’opter pour un temps partiel est le signe d’une forme de désengagement. En conséquence, les promotions hiérarchiques sont plus faibles : Si 59 % des mobilités internes réalisées au cours de l’année 2019 étaient assimilables à une promotion pour les hommes cadres, cette part n’était que de 43 % pour les femmes cadres.

L’intériorisation de freins, autre facteur explicatif, est présente en début de carrière mais semble s’atténuer fortement dans le temps : si seulement 47 % des femmes cadres de moins de 35 ans se disent prêtes à se porter candidates si le poste de leur N+1 se libérait (contre 68 % des hommes cadres), elles le seraient autant que les hommes après 35 ans.

Les cadres ont le sentiment d’une implication grandissante de leurs organisations : 77% des cadres estiment que leurs entreprises s’impliquent suffisamment sur le sujet. Ce sentiment est plus fort chez les hommes (82%) que chez les femmes (69%). L’entreprise et leur·es dirigeant·es arrivent d’ailleurs en tête de la liste des acteurs que les cadres considèrent comme les plus à même de favoriser l’égalité professionnelle. Avec 55%, elles devancent les ressources humaines (41%), les managers (33%) et les pouvoirs publics (22%). Si la plupart des actions sont perçues favorablement, l’instauration de quotas, préconisé par le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes pour les comités exécutifs divise les cadres : les hommes y sont plutôt opposés (66 %), les femmes sont plus partagées (52 %). Les femmes de 35 à 54 ans, âges auxquels se détermine l’accès aux responsabilités, sont les plus favorables à cette mesure (57 %), mais même parmi elles les avis sont divisés.

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